Certains éducateurs (ou votre beau-frère) aiment se vanter de faire disparaître rapidement un comportement indésirable chez un chien. Cela consiste généralement à lui faire mal (en lui tapant dessus, en lui écrasant les pattes, en l’étranglant ou en lui donnant un coup de décharge électrique avec un collier vendu sur catalogue, par exemple). Cela ne demande pas beaucoup d’efforts. Quant à l’aspect émotionnel du chien, vous pensez bien qu’on s’en moque (quoi ? les émotions d’un chien ? Vous voyez bien qu’il est content là…. hum).
Bref, tout ça pour dire que ce n’est pas en faisant disparaître le comportement qui nous dérange que le problème est résolu. Et le problème c’est quoi ? C’est l’émotion du chien qui provoque ce fameux comportement qui nous dérange.
Prendre en compte les émotions
Prenons le cas des chiens réactifs. La plupart le sont parce qu’ils ont peur. Alors bien sûr, en général les propriétaires de ces chiens pensent plutôt qu’ils veulent casser la gueule à l’autre parce qu’ils sont dominants, agressifs, fous, etc. Et bien figurez-vous que le fait de se jeter en bout de laisse, d’aboyer comme un diable et de se montrer sous son plus mauvais jour, c’est une manière d’inciter l’autre à dégager de là. C’est une mise à distance. Et pourquoi votre gentil toutou veut faire dégager l’autre chien ? Parce qu’il a peur, bien souvent.
Alors le type qui vous promet de faire disparaître tout mauvais comportement à coup de collier étrangleur et de badine, il fait quoi ? Il fait comprendre au chien que s’il ne veut pas avoir mal, il ne doit pas réagir et tolérer l’autre chien qui approche. C’est formidable me dites-vous ! Ben non ! Parce que la peur de votre chien est toujours là. Il prend sur lui. Il stresse. Ça fait cocotte-minute. Il peut se résigner et déprimer. Il se peut aussi que sa peur se transforme terreur sans nom (peur de l’autre chien + peur qu’on lui fasse mal) et dès qu’il verra un chien à 50 mètres il commencera à se déchaîner alors qu’avant il réagissait seulement à moins de 5 mètres. Et dans certains cas, le chien sera tellement sous pression qu’il finira par mordre l’humain au bout de la laisse (vous) ou une autre cible à proximité à défaut de pouvoir se décharger sur le chien qui approche. Formidable progrès !
Changer d’approche
Franchement, quand vous avez mal à la tête depuis des mois, que ça pourrit votre vie, et que votre médecin ne vous prescrit que du doliprane sans chercher plus loin, ça vous fait quoi ? Et encore, vous avez de la chance parce que le doliprane ça fait pas mal quand on le prend. Mais après quelques mois de fortes doses de paracétamol, quand vos organes lâchent petit à petit, que votre tumeur au cerveau grossit régulièrement et devient inopérable, vous ne pensez pas que votre médecin aurait dû voir plus loin (et vous aussi par la même occasion) ?
Conclusion, traiter la cause, plutôt que les symptômes, s’avère aussi payant en médecine qu’en éducation canine. Si votre chien a peur, travaillez avec lui pour qu’il se sente plus à l’aise dans les situations qui l’inquiètent (par exemple, dans un premier temps, prenez de la distance en croisant d’autres chiens). Si votre chien est très excité (de joie) et vous saute dessus, travaillez sur ces moments d’excitation pour les rendre moins festifs. Si votre chien est stressé dans certaines situations, aidez-le à se sentir plus à l’aise (en l’y confrontant petit à petit, en association avec des récompenses alimentaires ou du jeu). Au moins, si vous ne le contraignez pas physiquement et ne lui tapez pas dessus, vous ne risquerez pas d’aggraver la situation.
Alors oui, ça peut prendre du temps. On travaille sur des émotions (cause), pas véritablement sur le comportement (symptôme). Mais ce temps que vous consacrez au bien-être de votre chien fait partie de votre relation. Il aura davantage confiance en vous et vous le comprendrez mieux. C’est ça la véritable richesse d’une relation.